La prescription de l’action publique permet d’éteindre et donc de mettre fin à toutes les poursuites judiciaires, même celles qui sont en cours.
La prescription constitue une exception péremptoire (une fois établie elle s’impose, aucune contestation n’est possible) et d’ordre public devant être relevée d’office par le juge (Crim. du 20 mai 1980, n° 79-93.548; Crim. du 14 février 1995, n°93-85.640; Crim. du 19 avril 1995, n° 94-83.519).
L’article 8 du code de procédure pénale précise qu’il appartient au ministère public de démontrer que la prescription n’est pas acquise et d’en déterminer le point de départ.
De ce fait, la charge de la preuve de la prescription ne pèse pas sur les parties poursuivies comme le rappelle régulièrement la chambre criminelle de la cour de cassation (Crim. du 19 avr. 1995, n°94-83.519 ; Crim. du 23 septembre 2014 n°13-86.053)
Et qu’elle peut être invoquée à tout moment de la procédure et donc en appel ou en cassation même si elle n’avait pas été soulevée avant (Crim. du 20 janvier 2009, n° 08-80.021).
Elle emporte des effets empêchant toutes poursuites car la prescription :
- Ôte aux faits poursuivis tout caractère délictueux
- Constitue un motif juridique de classement sans suite
- Rend impossible l’exercice de l’action civile devant le juge pénal (art 10 du code de procédure pénale).
Les délais de droit commun
Attention : Les délais de prescription des crimes et délits ont été doublés par la loi 2017-242 du 2 février 2017
- Les crimes: 20 ans à compter du jour où le crime a été commis (article 7 du code de procédure pénale ).
- Les délits: 6 ans (article 8 du code de procédure pénale),
- Les contraventions: 1 an et ce, même si la contravention est connexe à un délit (article 9 du code de procédure pénale)à compter de la commission de l’infraction
En matière de délinquance financière, le point de départ du délai de prescription commencera à compter de la révélation des faits et non de leur commission. De plus, on ne pourra plus poursuivre sur des faits remontant à plus de 12 ans. Ce qui limite considérablement les chefs de poursuites .
Les délais spéciaux
Les délais plus courts
- Infractions en matière de droit de la presse: 3 mois à compter du jour de commission (art 65 et 65-1 de la loi du 29 juillet 1881)
Les délais plus longs
- Imprescriptibilité des crimes contre l’humanité
Mineurs:
- 30 ans à compter de la commission des faits pour les crimes prévus aux articles 706-16,706-26 et 706-167 du code de procédure pénale et aux articles 214-1 et suivants du code pénal.
- 20 ans à compter de la majorité de la victime pour les crimes de l’article 222-10 CP (violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente) et les délits des articles 222-12 (violences ayant entraîné une ITT pendant plus de 8 jours sur mineur de 15 ans ) ; 222-30 (agressions sexuelles aggravées sur mineur de 15 ans) et 227-26 CP (atteinte sexuelle aggravée sur mineur de 15 ans)
- 10 ans à compter de la majorité de la victime pour les délits de l’article 706-47 CPP ( agressions ou atteintes sexuelles à l’égard d’un mineur de 15 ans sans circonstance aggravante; proxénétisme et recours à la prostitution d’un mineur)
- Imprescriptibilité des crimes commis contre des mineurs prévus aux articles 211-1 à 212-3 du code pénal.
Le point de départ du délai de prescription
Les principes:
- Les infractions instantanées (consommées dans une même unité de temps)
La prescription commence à courir à partir du lendemain du jour où l’infraction est commise.
Ex : le vol
- Les infractions continues (les effets de l’infraction se prolongent dans le temps)
La prescription ne commence à courir qu’à compter du jour où l’infraction cesse.
Ex: le recel (la prescription commence à courir à partir du jour où la détention frauduleuse prend fin)
- Les infractions d’habitudes (qui résulte de plusieurs faits dont la répétition est punie par la loi)
La prescription ne commence à courir qu’à compter du jour du dernier acte constitutif de l’infraction)
Ex: appels téléphoniques malveillants la prescription ne court qu’à compter du dernier appel ; l’exercice illégal de la médecine, la prescription ne court qu’à compter du dernier acte pratiqué…).
Les exceptions :
- Les exceptions légales
La prescription des crimes et délits commis contre les mineurs ne commence à courir qu’à compter de leur majorité
- Les exceptions jurisprudentielles
Ex : la prescription du délit d’escroquerie (infraction instantanée consommée par la remise des fonds) ne commence à courir qu’à compter de la dernière remise.
Les actes interruptifs de prescription
Les articles 7, 8 et 9 du code de procédure pénale prévoient que tout acte d’instruction ou de poursuite est interruptif de prescription.
Dans ce cas, tout est à refaire. Le délai déjà écoulé s’efface (il est perdu) pour laisser place à un nouveau décompte des délais de prescription.
Selon la Cour de cassation sont interruptifs tous « les actes qui ont pour but de constater une infraction, d’en rassembler les preuves, d’en rechercher les auteurs » (Crim., du 20 février 2002, n° 01-85.042)
Il s’agit :
- Des constitutions de partie civile
- Des actes de mise en mouvement de l’action publique
- De la citation directe devant le tribunal correctionnel,
- Du réquisitoire introductif
- Des instructions d’enquête par soit transmis;
- Des procès verbaux des enquêteurs constatant une infraction
- Des procès verbaux de vaines recherches
La suspension de la prescription
Elle ne fait qu’arrêter le cours de la prescription sans effacer le temps écoulé. Donc contrairement à l’interruption, on ne recommence pas à zéro).
Cela concerne les exceptions préjudicielles, ou la mise en œuvre d’une mesure alternative aux poursuites (rappel à la loi, médiation pénale…).
Tant qu’elles sont en cours ces mesures suspendent les délais de prescription et si elles n’aboutissent pas, le délai reprend comme si la mesure n’avait pas eu lieu.