Le ministère public décide de l’opportunité de la mise en mouvement de l’action publique. Cela signifie qu’il appartient au procureur d’apprécier quelle suite sera donnée aux poursuites, dépôt de plaintes et procédures en cours.
Un tel choix n’est pas anodin car une fois lancées, le ministère public ne peut plus revenir en arrière. Il ne peut plus abandonner les poursuites.
Le fondement de l’opportunité des poursuites reconnu au Ministère Public
La reconnaissance de l’opportunité des poursuites est posé dans un arrêt de la Cour de cassation en date du 8 décembre 1826 « le législateur n’avait pu vouloir astreindre les officiers du ministère public à poursuivre sur toutes les plaintes, même les plus légères et les plus insignifiantes, sur les plaintes qui n’intéressent pas directement l’ordre public et qui souvent n’ont pas d’autre but que de satisfaire les passions ou les haines particulières, des intérêts de vanité ou d’amour-propre ».
Un principe sans cesse réaffirmé par les juges de cassation « l’opportunité des poursuites n’est pas contraire aux dispositions de l’article 6, alinéa 1er, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ». (Cass. crim. 21 septembre 1993).
Depuis la loi du 9 mars 2004, qui instaure les alternatives aux poursuites est fondé sur le principe d’opportunité des poursuites définit aux articles 40 et 40-1 du code de procédure pénale.
Article 40 du code de procédure pénale :
« Le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner conformément aux dispositions de l’article 40-1. Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. »
Article 40-1 du code de procédure pénale :
« Lorsqu’il estime que les faits qui ont été portés à sa connaissance en application des dispositions de l’article 40 constituent une infraction commise par une personne dont l’identité et le domicile sont connus et pour laquelle aucune disposition légale ne fait obstacle à la mise en mouvement de l’action publique, le procureur de la République territorialement compétent décide s’il est opportun :
- 1° Soit d’engager des poursuites ;
- 2° Soit de mettre en oeuvre une procédure alternative aux poursuites en application des dispositions des articles 41-1 ou 41-2 ;
- 3° Soit de classer sans suite la procédure dès lors que les circonstances particulières liées à la commission des faits le justifient. »
La décision du parquet ne consiste plus seulement à choisir entre la poursuite et le classement sans suite. Il peut opter pour ce que l’on appelle la 3ème voie : Ce sont les alternatives aux poursuites.
Les alternatives aux poursuites
La décision du parquet ne consiste plus seulement à choisir entre la poursuite et le classement sans suite.
Le développement des mesures alternatives permet d’éviter de faire des classements sans suite « secs ». Elles apportent une réponse judiciaire plus diversifiée pour d’une part protéger les droits des victimes et d’autre part dissuader les auteurs d’infraction qui pouvaient croire à leur impunité en l’absence de poursuites.
Trois options sont offertes au procureur par l’article 40-1 du code de procédure pénale :
- la poursuite devant la juridiction d’instruction ou de jugement
- la mise en œuvre d’une procédure alternative aux poursuites
- le classement sans suite pur et simple
Désormais, la disparition des classements sans suite « secs » dans les affaires où des auteurs d’infraction sont identifiés et interpellés est la règle.
Il suffit de se référer aux circulaires d’action publique de la Chancellerie qui n’envisagent plus les classements sans suite. C’est l’ère de la tolérance Zéro. Ainsi, la circulaire « politique pénale » du 9 mai 2001 préconise que la réponse pénale soit apportée « par un recours croissant aux alternatives aux poursuites ».
La circulaire du 14 mai 2004, est encore plus directive « la réponse que le procureur peut apporter lorsqu’une infraction est commise par une personne identifiée doit, en principe, consister soit en la mise en mouvement de l’action publique, soit en une procédure alternative ».
Que se passe-t-il si le procureur ne donne pas suite à un dépôt de plainte et qu’il classe l’affaire ? À première vue le principe de l’opportunité des poursuites donne tout pouvoir au procureur. Mais il n’en est rien, car son choix peut être remis en cause de plusieurs manières.
La saisine du doyen des juges d’instruction
La victime ou toute personne se prétendant lésée peut, en dépit du refus du procureur, mettre en mouvement l’action publique.
Elle peut saisir le doyen des juges d’instruction ou la juridiction de jugement (par citation directe), la loi du 5 mars 2007 précise que pour pouvoir engager les poursuites la victime doit :
- déposer plainte avec constitution de partie civile (le parquet est alors obligé de poursuivre)
- apporter la preuve du refus d’exercer des poursuites du ministère public (il doit envoyer un courrier motivé précisant pourquoi il classe l’affaire)
- démontrer que sa plainte est restée sans aucune réponse pendant plus de trois mois.
Les poursuites imposées par la hiérarchie
Le procureur de la République et ses substituts
Le procureur de la république contrôle l’appréciation faite par ses subordonnés appelés les substitus. La loi du 9 mars 2004 codifiée aux articles 36 et 37 du code de procédure pénale donnent au procureur de la république la possibilité de donner des instructions de poursuivre
Le procureur Général
La victime peut aussi former un recours auprès du procureur général, qui est le supérieur hiérarchique du procureur de la République, contre la décision de classement sans suite. Il s’agit de l’hypothèse prévue à L’article 40-3 du code de procédure pénale qui prévoit, que toute personne ayant dénoncé des faits au procureur de la République resté sans suite.
Le procureur général peut alors :
- Enjoindre au procureur de la République d’engager des poursuites
- Informer l’intéressé que son recours est infondé.
L’orientation de la politique pénale
La circulaire dite « action publique » du 9 mai 2001 et reprise aux articles 30 et 35 donne une définition des moyens et des actions devant être mises en œuvre pour tenir compte des orientations prévues par les pouvoirs politiques.
Par exemple, si le gouvernement décide de mettre l’accent sur les violences faites aux femmes, il y aura impunité zéro pour tous les faits constatés (poursuites, signalements, dépôt de plainte…) il devra obligatoirement y avoir une réponse pénale.
Cette orientation de la politique pénale permet d’harmoniser et d’encadrer les décisions du parquet surtout le territoire national.