La sauvegarde de justice est un régime de protection transitoire strictement limité dans la durée.
Il existe en réalité 3 formes de sauvegarde de justice distinctes : Une sauvegarde de justice médicale, et deux sauvegarde de justice judiciaires.
La sauvegarde de justice médicale
Il s’agit de l’hypothèse prévue aux articles 434 du code civil et L.3211-6 du code de santé publique selon lesquels un médecin est tenu de faire une déclaration au procureur s’il constate que son patient subit une « altération des facultés mentales ou de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté »
La condition pour effectuer ce signalement est que la personne doit être incapable de pourvoir seule à ses intérêts (article 425 du code civil).
Cette déclaration est facultative si la personne n’est pas hospitalisée. Le médecin dispose d’un pouvoir d’appréciation qui ne pourra pas être remis en cause. S’il en décidait autrement, pour que le majeur soit placé sous sauvegarde de justice, le médecin devra joindre à sa déclaration l’avis conforme d’un psychiatre (L.3211-6 du code de santé publique).
Si la personne était hospitalisée en établissement public, ou privé, spécialisé dans les troubles mentaux au moment ou le médecin découvrait l’altération de ses facultés mentales, il aurait dans ce cas l’obligation de faire une déclaration au procureur de la République du lieu de traitement. Ce dernier devra en référer au procureur du lieu d’habitation du majeur qui saisira le juge des tutelles.
Cette déclaration suffira à ouvrir une sauvegarde de justice.
Les sauvegardes de justice judiciaire
La sauvegarde de justice instaurée durant l’ouverture d’un régime de protection
Quand le juge des tutelles est saisi d’une demande de régime de protection, le jugement ne sera rendu que bien plus tard après une instruction, sans cependant dépasser une année. Dans l’attente, il convient de protéger le majeur pour tous les actes passés en le plaçant sous sauvegarde de justice.
La décision, transmise au procureur de la République est insusceptible de recours (c’est un acte d’administration judiciaire).
La sauvegarde de justice « ponctuelle » ou « rénovée »
Cette sauvegarde est une innovation de la loi de 2007 qui réforme le régime des majeurs protégés.
Il s’agit d’une protection judiciaire ponctuelle permettant à une personne dont les facultés sont altérées d’être représentée dans un cadre précis. Il peut s’agir d’un acte relevant de sa vie personnelle ou de ses intérêts patrimoniaux (vente d’un bien…). Dans ce cas, plutôt que d’ouvrir une tutelle avec un conseil de famille ou une curatelle, le majeur protégé fera l’objet d’une sauvegarde de justice et sera donc suffisamment protégé juste le temps d’effectuer l’acte.
Suivant la procédure devant le juge des tutelles, il faudra un certificat médical circonstancié par un médecin habilité figurant sur une liste annuelle établie par le procureur de la République.
Spécificités du régime de la sauvegarde de justice
La personne placée sous sauvegarde dispose de tous ses droits civils, civiques et politiques et n’aura pas besoin d’être assistée ou représenter pour exercer ses droits.
L’intérêt de ce régime est qu’il protège la personne a posteriori :
- Il offre la possibilité de revenir sur des actes passés à son détriment qui pourront être annulés (article 414-1 du code civil), rescindés pour lésion ou réduits pour excès devant les tribunaux.
En clair tous les actes passés par une personne placée sous sauvegarde seront valables au moment où elles les passent mais ces derniers pourront être remis en cause voire annulés dans les cinq ans suivant leurs conclusions (prescription de droit commun). Les tribunaux prendront en compte le patrimoine de la personne protégée, l’utilité de la transaction et la bonne ou mauvaise foi des cocontractants.
- Il permet une protection du patrimoine de la personne sous sauvegarde. Ses proches pourront accomplir tous les actes conservatoires nécessaires à la préservation du patrimoine de la personne protégée (article 436 du code civil). De même que si le majeur avait accordé une procuration à un proche, elle ne sera pas remise en cause et restera toujours valable.
La désignation d’un mandataire spécial
Cependant, le juge des tutelles pourra désigner un mandataire spécial charger d’exercer certains actes (ce n’est pas un mandat général sur tous les biens) à la place du majeur tels que les actes personnels, patrimoniaux (voire les deux), de gestions courante (perception des revenus, règlement des charges courantes…). Il pourra aussi être autorisé à faire des actes de dispositions (vente d’un bien, hypothèque..)
Le majeur sous sauvegarde ne pourra plus exercer un acte dont l’exécution a été confié à un mandataire spécial et ce dernier devra rendre compte de sa gestion.
Avant de désigner le mandataire spécial, le juge des tutelles devra recueillir l’avis du majeur et du proche auquel il envisage de confier cette mission (articles 437 alinéa 2 et 448 à 451 du code civil). Cette décision est susceptible d’appel (article 1250 du code de procédure civile).
La durée de la mesure de sauvegarde
En principe les 3 modes de sauvegarde de justice ne peuvent être prononcés que pour une année.
La sauvegarde judiciaire prise en attendant l’ouverture d’une mesure de tutelle ou de curatelle cesse dès que le jugement est rendu. Si aucune décision n’est intervenue une année après la requête introductive d’instance, tant la procédure de protection que la décision de sauvegarde seront frappées de caducité.
Cependant, les sauvegardes médicales et « ponctuelles » pourront être renouvelées une fois, pour une année. Le juge des tutelles statuera sur l’opportunité du renouvellement sur la base d’un nouveau certificat médical circonstancié et après avoir entendu le majeur.
La sauvegarde médicale prendra fin si le médecin atteste au procureur que la situation ayant motivée la sauvegarde n’existe plus.
La sauvegarde « ponctuelle » cesse une fois que l’acte pour lequel elle avait été prononcée à été passé ou sur mainlevée du juge des tutelles.
La publicité
Les mesures de sauvegarde figurent sur un répertoire spécial distinct du répertoire civil.
Ce répertoire est géré par les services du parquet qui en autorise la consultation dans les conditions fixées à l’article 1251-1 du code de procédure civile, c’est-à-dire aux autorités judiciaires, aux proches de la personne protégée (article 430 du code civil) aux avocats, aux notaires et aux huissiers de justice qui en justifient l’utilité.