Passer un contrat avant la célébration du mariage permet aux futurs époux de déroger au régime matrimonial de la communauté légale qui aura vocation à s’appliquer d’office aux personnes mariées.
Le contrat permet aux futurs époux de choisir l’ensemble des règles qui régiront leurs rapports patrimoniaux. Cela détermine la propriété et la gestion de leurs biens personnels et communs, ainsi que leurs transmissions à leurs descendants.
Ce choix peut intervenir avant le mariage (le contrat de mariage) ou pendant le mariage (c’est le changement de régime matrimonial).
Le contrat de mariage est un acte juridique solennel, établi par un notaire et soumis à publicité pour être opposable aux tiers. À ce titre, il est strictement encadré par les dispositions contenues aux articles 1394 et suivants du code civil.
Un acte notarié
Le notaire intervient pour conseiller et protéger les futurs époux, puisque l’acte intervient avant le mariage. Il ne s’agit pas de conclure l’acte sous seing privé pour ensuite le déposer chez le notaire comme cela se fait en matière de divorce sur consentement mutuel « déjudiciarisé ».
Les futurs époux doivent se rendre ensemble chez le notaire.
L’original de l’acte, rédigé en français, est gardé chez le notaire (au rang des minutes), les époux n’en ont que la copie. Pour être valable, il devra être timbré et signé par le notaire et les futurs époux.
Si le mariage n’a pas lieu, le contrat est tout simplement caduque.
Il s’agit d’un contrat, donc le consentement libre et éclairé des promis est requis. En principe, ils comparaissent et signent l’acte en personne, cependant ils pourront être représentés par un mandataire muni d’une procuration spéciale.
La capacité de conclure un contrat de mariage
« Habilis ad nuptias, habilis ad pacta nuptialia » Qui peut se marier peut consentir à un contrat de mariage.
Cela signifie que la capacité requise pour conclure un contrat prénuptial obéit à celle du mariage. Il faut être majeur pour se marier. Cependant des dispenses peuvent être accordées pour permettre au mineur de se marier. donc un mineur et un majeur protégé pourront valablement conclure l’acte, mais sous certaines conditions.
Les mineurs
Selon les articles 144 et 145 du code civil, toute personne peut se marier sans formalité dès l’âge de 18 ans.
Avant cet âge il leur faudra une dispense, même s’ils sont émancipés (article 148 et 481 alinéa 2 du code civil).
L’article 1398 du code civil dispose que « le mineur à contracter mariage est habile à consentir toutes les conventions dont ce contrat est susceptible… Pourvu qu’il ait été assisté, dans le contrat, des personnes dont le consentement est nécessaire pour la validité du mariage… ».
Le contrat de mariage est conclu par le mineur seul, mais en présence des personnes dont le consentement était requis au mariage. Il s’agit principalement des détenteurs de l’autorité parentale (les parents, un tiers…) ou d’un mandataire : C’est la représentation.
Si l’acte est passé sans assistance « l’annulation pourra être demandée par le mineur ou par les personnes dont le consentement était requis… » ( article 1398 alinéa 2).
L’action en nullité doit être exercée au plus tard dans l’année suivant la majorité du mineur.
Les majeurs protégés
La conclusion d’un contrat de mariage suivra le même régime d’assistance et de représentation que le mariage d’une personne protégée.
Sous sauvegarde de justice, le majeur peut librement se marier et donc, conclure un contrat de mariage sans assistance ni représentation. Mais l’acte pourra être remis en cause s’il s’avérait ultérieurement qu’il souffrait de troubles mentaux au moment de la conclusion de l’acte.
Sous curatelle, le majeur doit être assisté de son curateur. En cas de refus d’assistance ou d’opposition du curateur, le majeur pourra demander l’autorisation de passer l’acte seul au juge des tutelles.
Sous tutelle, le majeur doit être représenté par son tuteur (article 1399 du code civil).
La liberté de choix du régime matrimonial
En matière de convention matrimoniale, le principe est que tout est possible.
Les futurs époux pourront librement choisir l’étendue de leurs pouvoirs, droits et obligations respectives auquel sera soumis leur régime matrimonial.
Ils pourront adapter les régimes légaux (communautaires, séparation de biens, participation aux acquêts…) ou opter pour un régime « à la carte » en fonction de la situation personnelle, professionnelle et financière du couple.
Ils pourront consentir des libéralités ou des donations en vue du mariage (c’est la dot !) ou dans la succession.
Les limites
Il s’agit en premier lieu des règles du régime primaire qui s’appliqueront aux époux quel que soit le régime matrimonial choisi. Ainsi serait frappée de nullité absolue une clause prévoyant qu’un époux pourrait disposer librement du logement familial ou des meubles meublants sans le consentement de son conjoint.
Les clauses du contrat de mariage doivent respecter l’ordre public et les bonnes mœurs.
Certains régimes, tout droit sortis du XVIIIe siècle, sont désormais interdits, car contraire à l’ordre public matrimonial, mais à titre d’exemple « historique » citons :
- Le régime dotal : les biens immobiliers de la femme sont exclusivement gérés par le mari. La femme ne jouit que de droit paraphernaux (eh oui !… cela signifie que la femme ne peut librement disposer que des biens qui ne sont pas visés par le contrat et non compris dans la dot).
- Le régime sans communauté : Les époux ne vivent pas ensemble (Madame est isolée à la campagne) et seul l’époux a le pouvoir de gérer et d’administrer les biens de l’épouse.
À noter : Le contrat de mariage suit les principes généraux du contrat en matière de vice de consentement et pourra être annulé s’il s’avérait que le majeur ou le mineur y avait consenti par erreur, violence ou dol.
La publicité de l’acte
Le contrat de mariage doit être publié, c’est-à-dire porté à la connaissance du public (article 1394 alinéa 2 et 4 du code civil).
Le notaire remet aux futurs époux un certificat qui sera remis à l’officier civil avant la cérémonie. Lors de la célébration du mariage il sera demandé aux époux s’ils ont fait un contrat de mariage et devront préciser le nom et le lieu d’établissement du notaire pour l’inscrire sur l’acte de mariage.
En cas de manquement aux conditions de publicité, le contrat ne sera pas nul, mais inopposable aux tiers. Cela signifie que même si les époux optaient pour un régime de séparation de biens, tant que l’acte n’est pas publié, un créancier pourra se retourner contre les deux époux en application du régime de la communauté.
À noter : Si le contrat de mariage est conclu par un futur époux ayant la qualité de commerçant, l’acte devra faire l’objet d’une publicité auprès du registre de commerce et des sociétés (article 1394 alinéa 4 du code civil).
La démarche doit être faite par le notaire dans le mois suivant la conclusion de l’acte. Il doit envoyer un extrait du contrat de mariage au greffe du tribunal de commerce précisant le régime matrimonial auquel sont soumis les futurs époux.