Obéissant au principe de séparation des pouvoirs entre le judiciaire et l’exécutif par la loi des 16 et 24 août 1790, Napoléon Bonaparte va instituer dans la constitution de 1799 (de l’An VIII) une nouvelle juridiction administrative, le Conseil d’État.
Il faudra attendre la loi du 24 mai 1872 pour que les juridictions administratives deviennent indépendantes en exerçant leurs missions « au nom du peuple français » et plus seulement au service de l’État. Le conseil constitutionnel a érigé le principe d’indépendance des juridictions administratives au rang de principe fondamental reconnu par les lois de la République.
Le premier ministre est le président en droit de la juridiction suprême, mais c’est le Vice-président du Conseil d’État qui dirige l’institution.
L’article 61-1 de la constitution et la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 confient deux missions au conseil d’État. Il est conseiller du parlement et du gouvernement pour élaborer des textes de loi (1) et juge de l’administration (2).
Fonctions consultatives auprès des pouvoirs publics
Prévu aux articles 38 et 39 de la constitution, il rend un avis obligatoire sur la régularité juridique des projets de loi et d’ordonnances, au regard du droit interne et le droit européen, avant de les soumettre au vote du parlement. Ce n’est qu’un avis, les conseillers ne peuvent ni en discuter le bien-fondé ni remettre en cause l’action du gouvernement qui reste libre de suivre leur avis ou non.
Son avis est également requis pour des décrets et certains actes individuels (mesure individuelle de naturalisation, reconnaissance d’utilité publique d’une association…).
Les missions de conseil des pouvoirs public et juridictionnelles sont strictement délimitées. Un juge ne peut pas exercer sur une même affaire les fonctions de juge et de conseiller. De même que les juges de la section contentieuse ne pourront pas avoir accès à ces dossiers pour juger une affaire. La stricte séparation de ces deux fonctions garantit l’indépendance des magistrats dans leur office.
Il y a 5 sections :
- La section de l’intérieur : compétente pour les affaires dépendant du Premier ministre et des ministres de la justice, de l’intérieur, de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, de la culture et de la communication, des relations avec le Parlement, de la jeunesse, des sports et de l’outre-mer.
- La section des finances : affaires relevant de la compétence des ministères de l’économie et des finances, des affaires étrangères et de la coopération
- La section des travaux publics : affaires relevant de la compétence des ministres chargés de l’agriculture, de la pêche, de l’équipement, des transports, du logement, du tourisme, de l’industrie et des postes et télécommunications.
- La section sociale : chargée des affaires relevant des ministres chargés de l’emploi, de la solidarité, de la santé et des anciens combattants.
- La section de l’administration : Compétente pour toutes les questions relatives à la fonction publique ; aux questions touchant aux relations entre les administrations et les usagers ; à la réforme de l’État et des services publics ; à la procédure administrative non contentieuse ; à la défense nationale (sauf pour les questions relatives aux anciens combattants et victimes de guerre et aux pensions) ; à la commande et aux propriétés publiques.
Depuis la révision constitutionnelle de 2008, le Conseil d’État peut être saisi pour avis par le président de l’Assemblée nationale ou du Sénat sur une proposition de loi, s’ils l’estiment nécessaire.
Fonctions juridictionnelles
Le Conseil d’Etat tranche en dernier ressort les litiges entre les particuliers et l’administration au sens large (État, collectivités territoriales, établissements publics, personnes privées chargées d’une mission de service public comme les ordres professionnels ou les fédérations sportives…).
Le conseil d’État assure l’unité de la jurisprudence administrative. La fonction juridictionnelle est confiée à la section du Contentieux dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours.
Il est juge de cassation pour tous les jugements rendus en dernier ressort par les tribunaux administratifs. Comme la Cour de cassation, il ne rejuge pas l’affaire mais vérifie l’application du droit.
Cependant, si le droit est mal interprété, il ne renvoie pas une affaire devant une juridiction administrative pour être rejugée (contrairement à la Cour de cassation). Ainsi que le lui permet l’article L. 821-l du CJA, il va juger l’affaire lui-même et sa décision, qui se substituera à celle des juges du fond, sera insusceptible de recours.
Il est juge en premier et dernier ressort des recours contre les décrets et les ordonnances ; des litiges relatifs au recrutement et à la discipline des fonctionnaires nommés par décret du président de la République ; des décisions rendues par les Autorités Administratives Indépendantes ; des recours contre les actes réglementaires des ministres et les circulaires de portée générale.
Il est juge d’appel sur les litiges sur les élections municipales et cantonales ; des référés libertés et les questions préjudicielles sur l’appréciation des actes administratifs.
Il est juge de renvoi quand les juridictions administratives le saisissent pour donner son avis sur une question de droit nouvelle ou complexe posant une difficulté sérieuse dans une affaire ou pour répondre à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) transmise par les parties au litige.
Membres du Conseil d’État sont des fonctionnaires non-magistrat.
- le Vice président du conseil d’Etat
- les vices-présidents de section
- les conseillers d’Etat
- les maîtres des requêtes
- les auditeurs de 1ere et 2de classe.
La formation de la section du contentieux à la charge des recours juridictionnelle.
Les affaires simples sont instruites et jugées en collégiale (3juges) ou à juge unique pour les affaires les plus simples.
Elle est composée de 4 chambres.
- La chambre de « base » se réunit avec au minimum 3 juges parmi :
président de chambre, deux assesseurs, conseillers d’État, maître des requêtes et rapporteurs
- La chambre réunie : quand une affaire compliquée requiert la réunion de deux ou trois chambres
Président adjoint de la chambre de la section du contentieux, les présidents de chaque chambre, un assesseur de chaque chambres, un rapporteur
- La section du contentieux : (9 juges)
Président de la section du contentieux, les 3 présidents adjoints, les présidents de chambre, un rapporteur
- L’assemblée du contentieux :
Le vice-président du Conseil d’État, les présidents des 7 sections, les 3 présidents adjoints de la section contentieux, le président de la chambre en charge du dossier, les 4 présidents de chambre les plus anciens dans leur fonction, un rapporteur
A noter : Le conseil d’État reste soumis aux décisions du tribunal des conflits chargé des conflits de compétence entre les juridictions de l’ordre judiciaire et administratif.